Recherche avancée

Le sport dans les collections de dépôt légal

Au moment où les Jeux olympiques d’été se tiennent à Paris, l’Observatoire du dépôt légal se penche sur le sport dans les collections reçues par la BnF. Ouvert à tous les documents et à toutes les pratiques sportives, sans jugement ni sélection, le dépôt légal rencontre l’Olympisme pour présenter un large panorama de l’édition sportive en France !

 

Pour cette édition de l’Observatoire, c’est tout le champ de la classification « Sport » définie par le cadre de classement « 796 » de la Bibliographie nationale française livres qui a été retenu. Son périmètre est vaste : en plus des sports olympiques, il comprend aussi les arts martiaux, les jeux d'extérieur, le sport automobile, la randonnée pédestre, la navigation de plaisance, l’éducation physique et sportive. La chasse et la pêche en font également partie. Les livres présentant des exercices de bien-être et de maintien en forme sont classés, eux, dans les indices sur la santé ou l’apparence personnelle ; les ouvrages sur le yoga ou les pilates, par exemple, ne sont pas classés avec les sports, pas plus que les échecs, le bowling et le billard, considérés comme des jeux par notre classification. En revanche, la psychologie, la gestion, l’économie, l’histoire et la géographie des sports font partie des ouvrages observés dans le cadre de cette édition. Il en va de même pour les biographies de sportifs. 

Au-delà des livres, cette grille a été appliquée de manière à réunir dans cet Observatoire tous les supports soumis au dépôt légal : cartographie, internet, son, vidéo, imagerie, estampes, affiches et documents multimédia. Depuis 2013, le recul temporel de dix ans donne à voir un paysage tout en diversité, qui fait une large place aux pratiques amateurs et ne reflète pas nécessairement le poids économique des sports observés, ni le nombre de leurs licenciés. Pour la recherche autour du sport dans tous ses aspects, ce travail met également en lumière de nombreuses ressources, parfois méconnues, que la BnF tient à la disposition de ses publics.

Du sport sur tous supports !

Une représentation relativement modeste dans les livres, internet, le son et la vidéo  

5 690 livres sur le sport ont été catalogués en dix ans. Cela inclut les biographies de sportives et sportifs, pour un peu plus d’une centaine d’ouvrages chaque année. Cette volumétrie ne constitue cependant que 0,8% de l’ensemble des ouvrages reçus pour la même période par la BnF. Un socle stable d’éditeurs est positionné sur ce segment. Le plus prolifique est Amphora. Viennent ensuite sur dix ans : Glénat, Budo éditions, L’Harmattan, Marabout, Solar éditions, Milan, Hugo sport, Vigot et Édilivre. Les mêmes se retrouvent pour la biographie augmentés de Talent sport et Mareuil éditions. La part de l’autoédition est, elle, de 3%. Il faut ajouter à ces documents, catalogués à la pièce, ceux qui sont orientés vers les 268 « Recueils » concernant le sport, où ils sont regroupés par fonds afin de constituer un ensemble cohérent. 

Pour le dépôt légal du web, sur tous les domaines français, l’analyse de la présence de vingt-cinq des sports les plus pratiqués en France place la thématique « sport » entre 1,5% et 1,7% du total des URL collectées. 

Avec environ 720 documents, la part du sport dans le dépôt légal de la vidéo est faible et représente moins de 1% de la totalité des vidéogrammes reçus. Les entrées de ces dix dernières années permettent néanmoins de découvrir des films de grands cinéastes sur le sport, comme 13 jours en France de Claude Lelouch et François Reichenbach, sur les jeux olympiques à Grenoble en 1968 dans le coffret « Claude Lelouch, 60 ans de cinéma » ; citons aussi Gasherbrum, la montagne lumineuse (1984) de Werner Herzog sur l’alpinisme, ou encore Trilogie pour un homme seul (1987) de Nicolas Philibert ainsi que plusieurs autres films que le documentariste a consacrés aux sports de 1985 à 1988, édités par Blaq Out dans un coffret « Nicolas Philibert : les films, le cinéma » en 2019.

Il en va de même pour le dépôt légal du son, des documents multisupports et des partitions. Cette modestie est à relativiser au regard de l’ensemble du dépôt légal qui, rappelons-le, concerne exclusivement la production éditoriale nationale : par exemple, la production française dans le domaine des sciences pures affiche, elle aussi, des scores largement inférieurs à 1% du total des documents reçus. 

Cartographie, multimédia et périodiques : les places fortes du sport

Alors que le dépôt légal cartographique est quarante fois moins volumineux que celui des livres, il fournit sur la période presque autant de documents au corpus avec 5 486 notices , soit près du tiers des dépôts reçus en dix ans par le département des Cartes et plans au titre du dépôt légal. Cela s’explique par la présence au premier rang des déposants depuis 2014 d’un éditeur sportif, la Fédération française de course d’orientation, et par le recoupement d’une part entre deux sports, randonnée pédestre et cyclisme, et d’autre part la thématique du tourisme qui est centrale dans le dépôt légal cartographique. 

 

En ce qui concerne le dépôt légal du multimédia, le sport est très présent dans les jeux vidéo qui constituent la moitié des documents reçus en dix ans. Certains éditeurs ont investi ce segment et disposent de labels dédiés comme Electronic Arts (EA Sports) ou Take 2 (2K Sports). Parmi les éditeurs français, on peut citer Nacon (anciennement BigBen interactive) qui publie à la fois des jeux de rugby, de course automobile ou encore de cyclisme suite à l’achat du studio français Cyanide en 2018 dont les jeux Pro Cycling manager et Le Tour de France étaient précédemment édités par Focus Home Entertainment.

La part du dépôt légal des jeux vidéo « sportifs » est, elle, difficile à évaluer car ces derniers sont dispersés dans plusieurs catégories. L’essentiel est indexé sous le genre « jeu de simulation » qui compte près de 950 notices en dix ans, mais ne se limite pas au sport, avec par exemple les simulations de vie, comme la fameuse série des Sims. Si l’on estime que le sport représente les deux tiers de la simulation, il représenterait 4,5% des dépôts multimédia. Ce chiffre cependant n’inclut pas les jeux de management comme Pro Cycling manager qui sont comptés en « jeux de gestion », ni les jeux de courses, en « jeux d’arcade ». 

Enfin, pour le dépôt légal des périodiques, le sport représente selon les années entre 3,5% et 6% des nouveaux titres. Sur une décennie, près de 721 périodiques ayant trait au sport ont été signalés dans la Bibliographie française. 

Un effet évènementiel incertain  

L’effet des grandes compétitions, coupe du monde ou JO, sur les volumes de l’édition sportive est incertain : l’universalité du dépôt légal, qui embrasse tous les sports, semble en effet absorber ces effervescences passagères. 

Pour les Jeux olympiques, on ne constate pas de lien fort entre la production éditoriale et l’actualité de l’événement. En 2022, 6 ouvrages ont pour sujet les JO mais 1 en 2021 et six en 2020, année de la dernière édition à Tokyo. Dans le secteur du jeu vidéo une production évènementielle est en revanche notable avec des éditions spécifiques comme Mario & Sonic aux Jeux olympiques de Rio 2016 de Sega. 

Les pics de publications de livres sur le sport sont atteints en 2018, année de la victoire française en coupe du monde de football masculin. Mais en 2022, alors que la France atteignait la finale, la production éditoriale dans le domaine du sport a connu une baisse de 9% par rapport à l’année précédente : cela pourrait-il indiquer une sensibilité de la production à la victoire exclusivement ? Le dépôt légal des périodiques ne montre, lui, aucun effet « coupe du monde » puisque les pics de dépôts de nouveaux titres sportifs sont atteints entre 2015 et 2017. 

La cartographie, centrée sur les pratiques amateurs, montre une production stable. De même, l’exploration de la collecte large du dépôt légal du web à partir de la liste de mots clés sur le sport voit chaque discipline occuper une proportion inchangée dans le total des URL collectées. Les collectes d’internet ciblées permettent en revanche de mieux repérer la documentation des évènements sur le web. La BnF collecte ainsi « l’actualité éphémère » tournée vers les réseaux sociaux et le web, avec près de 546 fiches créées sur le thème du sport. Différents évènements sont couverts comme la Route du Rhum, la Coupe du monde de football masculin ou les mondiaux d’athlétisme. Enfin, à l’image des collectes consacrées aux élections, des collectes spécifiques « Jeux olympiques » ont été mises en place depuis les JO de 2012 avec près de 5 000 sites collectés en dix ans. 

La domination des sports individuels

La typologie de l’édition sportive n’est alignée ni sur le nombre de licenciés, ni sur le classement des sports dont les compétitions sont les plus suivies. Elle reflète davantage les pratiques quotidiennes et fait la part belle aux sports individuels . Ce biais constaté pour la cartographie se retrouve aussi pour le livre, la vidéo ou le son. 

Le football malgré tout

Le football, sport le plus suivi et comptant le plus de licenciés, est le seul sport d’équipe dont le rang dans l’édition correspond à ces premières places. Il arrive en tête dans l’indice « sport » des livres déposés au titre du dépôt légal. Pour les biographies les footballeurs sont sept fois sur dix dans les premiers du classement. Deux auteurs sont familiers du genre, Luca Caioli avec des ouvrages centrés sur un footballeur (Ronaldo, Messi ou encore Mbappé) et Matt Oldfield avec des livres à destination des enfants et adolescents sur des footballeurs (Zidane, Neymar, etc.). 

Le football fait également partie des sports les plus présents en périodiques et dans les simulations de jeux vidéo avec des parutions annuelles de FIFA soccer (Electronic arts) et Pro Evolution Soccer (Konami). 

Dans le dépôt légal du son (phonogrammes), le football est bien présent avec, en 2022, une compilation Allez les bleus (Idol) destinée à accompagner l’équipe de France masculine de football au Qatar pour la coupe de monde. Quatre ans plus tôt, Les hits des champions 2018 (Warner) célébraient la victoire en Russie. En vidéo on peut citer Dans le secret des Bleus (RH prod 2012), Les plus grands buts (Nacarat prod, 2013) les grands clubs (Paris Saint-Germain, Manchester), ou des portraits de grands footballeurs (Ronaldo). Le dépôt légal du multisupport fournit également des documents concernant l’équipe de France (La fabuleuse aventure des Bleus, CLE international, 2019) ou des clubs (Union sportive d'Ivry : 1919-2019, 2018).

Enfin, les albums d’autocollants Panini alimentent les collections de l’imagerie du département des Estampes et de la photographie. Les dépôts suivent un rythme de 25 albums par an en moyenne. Après une hausse du nombre d’albums de football produits au début des années 2000, les thématiques semblent avoir été réorientées au profit des dessins animés Disney. Un périodique est également édité par la société : Panini Foot

Les classiques de l’édition sportive : randonnée pédestre, cyclisme, équitation, rugby et sports mécaniques

L’équitation est le deuxième sport le plus présent dans le dépôt légal des livres, avec un auteur phare, Guillaume Henry. Ce rang peut paraître surprenant compte tenu de son exposition médiatique mais elle fait partie des dix sports les plus pratiqués. Suivent le rugby et le cyclisme, avec les ouvrages sur le Tour de France, et ensuite la randonnée pédestre qui est l’activité sportive dont la pratique est la plus populaire. Cette dernière domine en cartographie avec 40% des documents consacrés au sport (2 237 en dix ans). Les éditeurs principaux sont la Fédération française de randonnée pédestre, Chamina, Glénat et les Editions Ouest-France. Le cyclisme sous toutes ses formes, notamment le vélo tout terrain, tient également une bonne place avec 10% des cartes et itinéraires sportifs.

C’est également un thème récurrent pour le dépôt légal du son (phonogrammes) avec par exemple À vélo, la vie est belle (2022) qui réunit « 20 chansons à la gloire du vélo » (Marianne Mélodie). Le groupe allemand, Kraftwerk inscrit le Tour de France dans les collections sonores avec le disque « Tour de France » sorti une première fois en 1983 en 45 tours. Après plusieurs rééditions présentes dans les collections de la BnF (1999, 2003, 2009) on retrouve l’album en 2020 sur un double vinyle et enfin dans un coffret triple album vinyle en 2022. La musique imprimée compte elle une Balade à vélo de Mahel Zeroual et Navii. Le vélo est enfin, avec le ski, un des sports les plus présents dans l’analyse effectuée sur le dépôt légal du web (plus de 10 000 noms de domaines)

Les sports mécaniques et les courses automobiles sont représentés dans le dépôt légal des livres, des périodiques, et de la vidéo avec les films documentaires ou de fiction dédiés aux compétitions. Ils comptent surtout parmi les jeux vidéo les plus populaires et ont donné lieu à de nombreuses franchises qui vont du jeu en circuit fermé de type Formule 1 aux circuits de rallyes, jusqu’à prendre la forme de courses automobiles en milieu urbain.

Parmi les sports bien représentés à un étiage inférieur dans le dépôt légal des livres, la navigation à voile progresse durant la décennie. Citons à ce propos les dépôts des entreprises, avec notamment les films consacrés au Trophée Jules Verne, course sponsorisée par Groupama. La cartographie y ajoute avec plus de cinquante documents en dix ans : la randonnée multisports, l’escalade, l’alpinisme, la plaisance et le ski

La personnalisation du sport en biographies : avantage alpinisme et boxe 

L’alpinisme n’apparait pas dans les classements des sports les plus pratiqués ou suivis, mais compte chaque année un bon nombre de biographies publiées. Le genre est néanmoins dominé par un boxeur, Muhammad Ali, suivi de Roger Federer et Raymond Poulidor auxquels des ouvrages sont consacrés presque tous les ans. A l’inverse, les parutions sur Kylian Mbappé se concentrent sur une courte période (entre 2019 et 2021). Le pourcentage de traductions dans ce secteur est important : 26 % des biographies sportives contre 18% des livres en moyenne, en majorité de l’anglais vers le français (185 ouvrages sur 275 ouvrages traduits).

 

Ces tendances se retrouvent dans le dépôt légal de l’audiovisuel. La vidéo se prête bien aux portraits de sportifs : Muhammad Ali, Lance Armstrong, Usain Bolt, Benjamin Chevillon, Alain Colas, François Gabart, Raymond Poulidor ou Teddy Riner. Le dépôt légal des phonogrammes montre que la chanson peut aussi illustrer le sport à travers la reprise d’un titre sur plusieurs décennies : en 1966, Graëme Allright avait interprèté « Qui a tué Davy Moore ? », version française d’un titre de Bob Dylan créé sur scène en 1963 après la mort du boxer. En 2021, Bernard Lavilliers reprend le titre sur l’album Sous un soleil énorme en compagnie d’Izïa (fille de Jacques Higelin), Éric Cantona (le footballeur), Hervé et Gaëtan Roussel  (Louise Attaque, Tarmac). 

Contre-performances : tennis, handball, basket, athlétisme, judo

Le tennis est le second sport le plus suivi et comptant le plus de licenciés ; on publie pourtant en France plus de livres sur le golf que sur le tennis. Le canoë-kayak dont la fédération est une des dix ayant le plus de licenciés, fait partie des sports sur lesquels il y a eu le moins de livres en 10 ans - mais en revanche de nombreuses cartes sont déposées grâce à l’éditeur Navikayak. Le handball et le basket, sports très appréciés et adoptés par de nombreux licenciés en France, sont les sujets de moins de livres en dix ans que la randonnée. Il y a plus de livres sur le taijiquan (Tai-chi-chuan) que sur le handball, plus de livres sur le golf que sur le basket, le karaté et le judo. L’athlétisme est l’un des sports les plus suivis mais il y très peu de livres sur le sujet ont été publiés depuis 2013. 

Les sports les moins représentés dans la production des livres sont : la boxe thaïlandaise, la pétanque, le biathlon, la danse, la lutte, le plongeon, le tennis de table, le polo, le badminton, l’aviron, l’haltérophilie, le volley-ball et la gymnastique.

En revanche il faut noter une grande diversité dans l’édition de périodiques. Nous citerons Approches du hand-ball, Le volleyeur du Nord, 100% badminton, Aïkidojournal ; France boxe, Génération catch, L’esprit du judo ou Pilota. Ou encore pour les sports aériens, Battement d’ailes, Vieilles plumes, Aviasport, Parapente mag ou sous-terrain, L’Écho des Vulcains, L’escarpolette, Voconcie.

Insolites et multisports

Au chapitre des activités sportives plus insolites, nous pouvons citer : trois ouvrages sur la soule (proche du rugby), deux sur le Tahtib (art martial égyptien) et le livre Sirène ! Claire la première sirène professionnelle suivie par plus de 600 000 abonnés ! de la « YouTubeuse » Claire la Sirène. 

Concernant les jeux vidéo, il faut relever que des jeux de sports édités sur support ont fait l’objet d’une édition incluant des périphériques adaptés (volant, canne à pêche, skate board, vélo, etc.) dont témoigne le dépôt légal au département Son, Vidéo, Multimédia de la BnF.

Le sport est enfin abordé comme sujet de manière générale. Dans la presse, à part le quotidien L’Equipe, les publications multisports existent mais adoptent le plus souvent un angle spécifique : le droit, avec les titres Le Dictionnaire permanent droit du sport, Les Cahiers de droit du sport ou Légisport ; les études statistiques, sociologiques ou économiques avec les Chiffres clés du sport, Quel sport ? : Section française de la critique internationale du sport, Sport et sciences sociales , European studies in sports history, Sport stratégies hebdo ou Qui sont les experts du sport business ?. Sur les 10 années observées, on trouve 14 ouvrages sur l’économie du sport, dont dix sur le football parmi lesquels trois abordent le sujet du PSG et du Qatar.

Un conservatoire du sport amateur

Un point fort de la collection sportive réunie par dépôt légal est de documenter les pratiques quotidiennes, amateurs, enracinées à l’échelon local, qui passent sous les radars du spectacle de masse et de ses évènements ponctuels. L’Observatoire propose quelques zooms sur cette face généralement cachée de la planète sportive dont témoignent les collections de la BnF à travers le dépôt légal. 

L’essor de la course d’orientation

Outre les classiques randonnées pédestres et cyclistes avec leurs guides, la cartographie sportive est largement irriguée par une troisième discipline, la course d’orientation. Les documents reçus sont des cartes à grande échelle, en feuilles de format portatifs A4 et A3, accessoire nécessaire à la pratique du sport. Elles indiquent la position des balises que les participants à la compétition doivent rejoindre le plus rapidement possible en courant ou en vélo tout-terrain. Elles respectent une sémiologie graphique internationale et sont fondées sur l’information des cartes topographiques de référence. 

Les premiers dépôts à la BnF datent des années 1970 et sont progressivement montés en puissance jusqu’à atteindre 430 cartes par an dans les années 2010. Elles sont déposées par la Fédération française de course d’orientation (FFCO), des fédérations départementales et des particuliers. La FFCO est désormais le premier déposant de cartes imprimées devant l’IGN ou Michelin. Cette explosion correspond à la diffusion du sport en milieu scolaire . Pour notre période, 2013-2022, on compte 2 107 cartes soit 38% des documents cartographiques sur le sport. À l’échelle même de la BnF, avec près de 10 000 documents, il s’agit d’une des plus importantes collections sportives à côté des périodiques les plus durables. Sa vigueur est d’autant plus remarquable à l’heure où les applications numériques remplacent les cartes imprimées de navigation.

Bulletins, programmes, réglementations, documentation : le paratexte du sport au quotidien 

Une multitude de sources directes pour l’histoire du sport est conservée à la BnF sous forme de recueils, c’est-à-dire regroupés par fonds qui se rapportent à leur émetteur. Elles sont issues de ceux qui font réellement le sport au quotidien : ceux qui l’organisent, le pratiquent, le réglementent ou en fournissent l’équipement. On trouve ainsi, en complément des ouvrages de la Bibliographie nationale française, de la documentation de grande variété :

- des publications émanant d’organismes publics (offices municipaux des sports, directions départementales jeunesse et sports, services d’inspection Jeunesse et sports), à des fins d’information (plaquette, brochures) ou de réglementation (recueils de circulaires) ; 

- de la documentation publiée par des associations sportives, clubs sportifs, unions sportives, fédérations sportives : rapports d’activités, guides pratiques ou touristiques de pratiques sportives, agendas, calendriers, catalogues de fournitures, documents et brochures d’informations, plaquettes annuelles, tarifs, programmes de formations, horaires… pour tout type de sports (sports aériens, sports automobiles, athlétisme, sports aquatiques…)

- des catalogues d’articles de sport et publications publicitaires, ou des rapports d’activités, pour des marques de vêtements ou d’articles de sport, ou des chaînes commerciales : Décathlon, Go Sport, Intersport, Au campeur, Aigle, Patagonia, Salomon, FilaNike

- des programmes d’équipements sportifs 

- de la documentation publiée à l’occasion de grands événements sportifs (catalogues officiels, guides, documents publicitaires) : Mondial de l’automobile, salons sportifs, Tour de France à la voile, jeux du Pacifique, courses de la coupe de l’America… Et même le dossier de candidature déposé par les Pays du Mont Blanc à l’occasion des championnats du monde de ski alpin de 1995 et 1997.

Côté périodiques, des titres sont également reçus sur le même segment comme : Enseigner l’EPS, INSEP magazine, Vestiaires : premier magazine consacré aux éducateurs de football, Diriger une piscine, L’Entraîneur de ski alpin, Contre pied, Terrains de sport : gestion et entretien, Atlas national des fédérations sportives

Le dépôt légal du web prend le relais quand ces sources se dématérialisent. À ce jour, 1043 sites avec pour thème principal « sport » sont sélectionnés pour être régulièrement collectés. Ces sélections concernent les associations sportives, cartes, sponsors, sites officiels de clubs, équipes, médias, projets de recherche… Il faut y ajouter la sélection des podcasts, chaînes Youtube ou comptes Instagram liés au sport.

Arts martiaux par l’exemple, croissance du e-sport, repli de la pêche

Relevons également quelques niches ou tendances sportives repérables dans les documents déposés au titre dépôt légal.   

Alors que les arts martiaux sont presque absents de l’édition de livres, ils s’épanouissent (au côté du fitness, stretching, musculation ou yoga) dans la collection multimédia, par une série de documents présentant des exercices physiques accompagnés de compléments audiovisuels permettant de mieux les appréhender. On peut citer Les arts martiaux de Michel Random (Budo, 2014),  Aikido et Karaté, synergie (Yves Thélen, Budo, 2013) ou Nouvelle lecture du taiji épée : style ancien de l'école Yang (Marianne Plouvier, You Feng, 2017). Cette forme éditoriale comporte un volet destiné à la jeunesse avec : J'apprends le djokan : Djokan timoun  (Yannick Théolade, Ketty Bunch, Canopé éditions, 2018), Mon premier livre de tai-chi (Gilles Diederichs, Caroline Modeste, Rue des enfants, 2018). 

Le jeu vidéo peut être considéré comme une pratique sportive, on parle alors d’e-sport, dont les joueurs professionnels disposent en France d’un statut officiel depuis la loi pour une République numérique du 7 octobre 2016. La collecte d’internet permet d’en noter la place croissante sur le web français, passant de 1 779 URL collectées en 2012 à 4 192 en 2022. Il s’agit alors d’un tout autre type de jeux que les simulations sportives où ce sont la dextérité, le sens tactique et la réactivité des joueurs qui font la différence. Parmi les jeux multijoueurs qui donnent lieu à des compétitions, on peut citer par exemple dans les collections de la BnF StarCraft 2 ou encore Rainbow Six. La BnF collecte 31 chaînes You Tube qui permettent de garder trace des parties de jeux en ligne en complément de la préservation des programmes. La journée d’étude de la BnF sur le thème « Comment préserver et étudier les jeux vidéo... sans y jouer ? », tenue à la BnF le 12 mai 2023 a été pour moitié consacrée à la documentation vidéo. La captation des interventions est disponible en ligne. 

Par ailleurs, à travers les publications déposées au titre du dépôt légal, on constate le repli durant les dernières années de secteurs éditoriaux de la pêche et de la chasse. La pêche sportive est le septième sport le plus représenté sur 10 ans, après la randonnée. Néanmoins le nombre de publications sur la pêche diminue depuis 2013 (un pic en 2015 avec 21 ouvrages pour arriver en 2022 à seulement 11 ouvrages). La chasse est le quinzième sport le plus représenté en dix  ans, après la course à pied mais avec une forte baisse commencée en 2020. Seulement trois livres ont été publiés en 2022 contre encore dix-huit en 2017 et 2018.

Lente féminisation de l’édition sportive

Durant les 10 dernières années observées dans le cadre de ce travail, des périodiques à destination des sportives sont apparus, comme Le guide officiel des cyclosportives, Surfeuses, ou l’édition française de Women sports : la femme est l’avenir du sport, un trimestriel lancé en collaboration avec la fondation pour le sport féminin de Billie Jean King. 

Une place nouvelle est faite au sport au féminin dans la vidéo : on peut citer les footballeuses de Douai dans Touche féminine de Maurice Ferlet, celles de Seine-Saint-Denis dans Les reines du stade de Sonia Mussier, ou encore les sénégalaises Ladies Turn de Hélène Harder.

Cependant, encore bien peu de biographies sont consacrées à des sportives. Seulement une vingtaine d’entre elles sont présentes dans le classement en 10 ans (contre 300 pour les sportifs) notamment Mariette Delangle (Hellé Nice), une des premières pilotes automobile professionnelles, la sportive sur laquelle on a publié le plus d’ouvrages, c’est-à-dire… quatre en dix ans.

 

Au terme de ce panorama, la BnF apparaît comme un conservatoire privilégié des pratiques sportives au moment même où elles produisent leur propre documentation. Plus qu’une caisse de résonnance des grands évènements médiatiques, elle enregistre grâce au dépôt légal leurs mouvements de fond, offrant aux chercheurs de vastes matériaux pour analyser les pratiques et regards sur le sport. Physique ou numérique, la thématique se retrouve sur tous supports et médias pour ouvrir à des recherches croisées qui seront encore amplifiées avec la montée en puissance du dépôt légal dématérialisé dans les prochaines années.